En attendant Gareth...

Viendra ti, viendra ti pas?

Morrigane, assise sur une botte de paille, chantonnait pour elle-même en attendant que Gareth se pointe. Rêveuse, elle regardait le ciel d'un air égaré, tissant et dénouant de vagues airs au fil du vent.
Le tout était de savoir s'il tiendrait sa promesse ou non.. De toute manière, avec ou sans lui, elle partirait; mais combien de temps l'attendrait-elle?

Morrigane se mordit les lèvres à cette pensée.

Se comporter ainsi ne lui ressemblait pas. Autrefois, elle se serait partie, avec ou sans lui, avec ou sans permission, sans se soucier des sentiments des autres, sans se soucier des lois ou des avis.
Alors qu'est ce qui l'empêchait de fuir quand même, sans l'attendre? Il y avait eu Mordred, pour la retenir ici; Gareth la retenait captive, d'une autre façon, mais tout aussi insidieusement. Encore une fois elle s'enfermait elle-même dans la prison d'un autre, fermait ces barreaux qui la retenait auprès d'un être ou d'un terre...

Morrigane n'avait jamais songé que ses propres sentiments puissent avoir un jour cet effet-là...

Elle posa un regard songeur sur le reflet qui dansait dans l'abreuvoir. Elle, ses tresses rousses et ses yeux d'eau claire, et les arabesques qui s'enroulaient en spirales noires sur sa peau d'albâtre...
Un soupira troubla son image, tandis qu'elle jouait pensivement, trempant l'extrémité de ses doigts dans l'eau.

L'attente s'éternisait...

Le bruit mat de sabots sur le sol terreux retentit derrière Morrigane...

C'était Gareth, enfin! le beau, fringant et inconséquent(?), jeune prince d'Orcanie.

Tout sourire, cuirassé, son épée de chevalier pendant à sa ceinture, et menant sa fière monture d'une main...Et une mule de l'autre ( qui traînait des pattes ).

Il s'immobilisa et interpella ainsi son amie :

Toujours là?
Je vois que vous êtes, décidément, plus que décidée a vouloir m'entraîner dans votre périple!

Et Gareth n'en était point fâché, bien au contraire!
Car si il y avait une valeur, un principe qu'il chérissait, c'était bien le beau mot de liberté...

Tout comme la petite bardesse!

Les bons esprits ( ici libertaires! ) finissent immanquablement par se rencontrer et...Cheminer ensemble.

Morrigane se redressa d'un bond à l'approche du petit prince, se retenant de se moquer de son accoutrement chevaleresque.

-Et bien, puis-je savoir où vous comptez aller, dans cette tenue? Chasser le dragon et pourfendre la chimère?

Elle eut un léger rire, sans méchanceté aucune, posant un regard espiègle et provocateur sur son jeune ami. Et puis, reprenant son sérieux, elle fit quelques pas sur le sentier, écartant ses orteils blanchis par la poussière.

-Sans rire, vous comptez vraiment voyager comme ça? A la première tourbière, au premier gué, on va vous perdre dans la vase, dit-elle en tordant le nez d'une manière assez comique. Je dois quand même vous ramener à votre frère en un seul morceau, ou il m'en cuira.

Morrigane resta songeuse un instant, l'air perplexe.

-Quoique, à l'entendre, je crois qu'il est persuadé que vous allez me protéger.

Elle pouffa, glissant un regard assez étrange vers Gareth.

-Vous verrez bien assez tôt que certaines armes ne servent à rien, petit prince.

Un instant de silence passa, elle frappa dans ses mains, riant sans raison comme une enfant. Nébuchad surgit des immensités bleutés du ciel, et voleta un moment autour de Gareth, intrigué par cette chose miroitante où se reflétait son ombre.

-Allons, ne faisons pas attendre le voyage, la route est longue jusqu'au bout du monde. Me suivrez-vous?

Elle lança un regard espiègle par-dessus son épaule, comme pour le défier de l'accompagner.

-Souvenez-vous de la condition que vous avez accepté, Gareth...

Gareth arqua un sourcil en considérant Morrigane, examina rapidement sa cuirasse resplendissante, jeta un coup d'oeil à ce vieux Nébu, qui voletait au dessus d'eux, avant de ricaner lui même...

C'est cela!
Gaussez vous autant que vous le voulez!
Vous me remercierez, en cas de combats violents...

Dit il, un peu trop fièrement, tout en lustrant un peu plus, d'une main, le plastron de sa cuirasse de chevalier. Pour ensuite tapoter la garde de son épée...

Et en effet, je défendrai corps et âme ( et arme :p ) votre adorable petite carcasse!

Gareth s'approcha davantage de la jeune barde et lui lança l'un des ses fameux clin d'oeil, sensé être irrésistible.

Mais je puis toujours m'adapter aux situations et à mon environnement, comme tout bon chevalier!

Proclama t-il crânement, avant de s'empresser d'acquiescer devant les exigences, renouvelées, de son amie :

Absolument!
Vous êtes mon guide, je vous suis et ce sans rechigner!

Que pouvait il dire d'autre? Lui qui n'avait jamais vraiment voyagé, à part pour emprunter la voie romaine reliant l'Orcanie à Camelot, ou la courte distance ( toute relative ) séparant le royaume du comté de Mannach...

Voici pour vous!
Car vous n'irez guère très loin sans monture?!

Lui fit il remarquer, narquois, en faisant avancer l'âne récalcitrant qu'il maintenait d'une poigne des plus ferme...

Mais le prince ne tarda point...A éclater de rire.

-Plus loin que vous ne le pensez, mon ami, dit Morrigane en riant.

Elle exhiba son pied nu couvert de poussière.

-Pourquoi aller vite à cheval, quand on peut marcher sur ses propres pieds? Les montures ne peuvent aller partout, au contraire d'un Homme; vous verrez, nous emprunterons des routes où vous regretterez vite d'avoir emporté tout ce fatras.

S'approchant de Gareth, elle frappa quelques petits coups sur sa cuirasse, l'air moqueur.

-Vous devez vous sentir à l'étroit, là-dedans. Quelle idée de s'enfermer de la sorte... Enfin! faites à votre guise, petit prince, et allons-y!

Ce disant, elle siffla Nébu qui vint se poser sagement sur son épaule, et elle se mit à marcher d'un bon pas, ignorant superbement l'âne qui suivait, bon gré mal gré. Le vent s'était levé, sifflant dans ses cheveux tandis qu'elle chantonnait de nouveau, murmurant des paroles presque inaudibles.
L'allégresse semblait lui donner des ailes, et elle marchait, d'un pas de danseuse, gracieuse et légère, prête à s'envoler, à fuir, à partir...

La cité s'évanouit comme un songe, chassé par le vent d'ouest qui soufflait à perdre haleine, couchant les blés et les hautes herbes en vagues luisantes. Ils franchirent sans tarder la courte distance qui séparait la ville des premières cultures, puis la route qu'ils suivaient s'enfonça sous le couvert des premiers arbres de la forêt...

Gareth ne pouvait comprendre l'insouciance de son amie la bardesse...

Il était chevalier, et altesse, il ne pouvait déroger en voyageant comme le plus simple des gueux, à la merci du moindre brigand!

Nous avions besoins de montures pour transporter nos biens les plus nécessaires, et quelques vivres.

De plus, pour ma cuirasse, je compte bien "m'effeuiller" en cours de route!

Déclara le jeune freluquet, mi figue mi raisin...

Ouvrez donc!
Je suivrai au pas.

Les portes du château franchies et les limites de Warminster dépassées, le vaste monde s'offrait enfin à nos deux voyageurs.
Devant eux les plaines verdoyantes ou jaunâtres des terres d'Orcanie...S'étendant à perte de vue vers un horizon plein d'attraits et de mystères.

Puis après avoir emprunté un mauvais chemin, qui serpentait entre les champs, les deux compères se "heurtèrent" à l'obstacle naturel qu'était la grande forêt de Warminster...

Et alors qu'ils s'enfonçaient dans cette jungle indescriptible, marchant vers l'inconnu(?), Gareth demanda :

Alors Morrigane?
Quelle sera donc la première étape de notre périple, dites moi!

Dit il, en s'essuyant le front du revers de sa manche...
Effectivement, son attirail commençait déjà à lui peser quelque peu.

( hj : on poursuit dans la forêt? Smile

)

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